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mardi 20 mars 2018

Les Notaires auraient-ils des dons de voyance ?



Pionnier, le congrès des notaires réfléchit, dès 1983, à  la nécessaire évolution des rapports entre les entreprises et leurs partenaires.


   
  Il y a quelques jours, Nicole Notat et Jean-Dominique Senard, après consultation d’environ 200 personnalités, ont remis à Monsieur Bruno Le Maire, Ministre de l’Economie, un rapport sur « l’entreprise, objet d’intérêt collectif ».

Ils envisagent une modification de l’article 1833 du Code Civil afin d’élargir la fonction de l’entreprise telle qu’elle ressort de l’article 1832 du même Code ; ils proposent en réalité une nouvelle définition de l’entreprise.

Selon leurs analyses, une société ou une entreprise n’est pas constituée uniquement dans l’intérêt commun de ses propriétaires mais dans l’intérêt également de certains enjeux sociaux et environnementaux.

 Les médias ont abondamment commenté ces propositions de réforme. D’aucuns n’ont pas hésité à les considérer comme un symbole extraordinaire, une vraie révolution allant bien au-delà de la sémantique et du vocabulaire juridique.

Une définition moderne de l’entreprise

Les notaires en exercice dans les années 1980 se disent avec nostalgie « rien de nouveau sous le soleil » en écoutant ces commentaires dithyrambiques.

Ils se souviennent qu’en mai 1983, lors de leur congrès national en Avignon, les notaires étaient 3.000 à réfléchir et à échanger durant 3 jours sur la nécessaire évolution des rapports entre les entreprises et leurs partenaires : salariés, fournisseurs, clients, pouvoir politique etc…

Au cours de ce débat, ils ont regretté l’absence d’une définition moderne de l’entreprise ; ils ont dénoncé les lacunes, les insuffisances de la définition résultant des articles 1832 et 1833 du Code Civil.

Ce congrès a alors vainement attiré l’attention de l’opinion publique, du monde politique, de la doctrine juridique, sur la nécessaire réforme de cette définition.

35 ans plus tard ce thème est enfin d’actualité. Le Président de la République semble vouloir en faire un axe essentiel de réflexion pour son quinquennat.

Il faut se féliciter de cette prise de conscience au niveau le plus élevé de l’Etat.

En faisant ces quelques observations historiques, certains pourraient s’étonner du don de voyance des notaires, caractéristique méconnue de la profession !!!!

Les notaires aux avant-postes de la réforme

Non, les notaires ne sont pas des devins, ils ne savent pas lire dans les astres. Il y a une explication plus simple ; le notariat reçoit annuellement 20 millions de clients.

A cette occasion, ils découvrent leurs préoccupations, leurs difficultés, leurs souhaits, mais aussi les insuffisances, les lacunes de notre corpus législatif et réglementaire face à la réalité quotidienne des français.

C’est la raison pour laquelle, dans leurs congrès nationaux, depuis les années 1950, ils sont toujours aux avant-postes de la réflexion réformatrice.

 Le congrès national des notaires de France est une sorte de thèse juridique collective de la profession prenant en compte l’évolution de la société française et la nécessaire adaptation de son environnement juridique et fiscal.

D’ailleurs, Jean Foyer, éminent professeur de droit, Garde des Sceaux dans les années 1960, à l’origine des réformes essentielles de notre droit, n’hésitait pas à écrire qu’il commençait toujours ses réflexions sur les modifications à apporter à notre droit par la lecture des travaux des congrès nationaux des notaires.

Ce sont ces travaux qui ont inspiré la réforme de droit des sociétés, de la copropriété, de l’urbanisme, des régimes matrimoniaux, de la transmission d’entreprise etc…

A titre anecdotique, on ne peut passer sous silence une certaine coïncidence. Le rapporteur général de ce congrès d’Avignon, Maître Dutour, Docteur en Droit, a ouvert les travaux par un discours commençant par une citation célèbre d’un illustre professeur de Droit déplorant il y a plus de 70 ans l’absence d’une définition de l’entreprise dans notre droit.
 
Ce Notaire, exerçait à Pont du Château (Puy de Dôme) ; c’est à une dizaine de kilomètres de Clermont-Ferrand, siège social de la Société Michelin, aujourd’hui présidée par Monsieur Sénard, co-auteur de ce fameux rapport.

Clin d’œil de l’histoire ? Hasard ? 

A chacun son interprétation.

Bernard MONASSIER
Président du congrès des Notaires de France
à Avignon en mai 1983


 Retrouvez plus de points de vue de Bernard Monassier sur Facebook BMFoffice et Twitter @OfficeBM et sur le site du Cercle des Fiscalistes

jeudi 15 mars 2018

M. Macron : succession Hallyday, une chance pour la France ?






  Le Président de la République, par sa présence aux obsèques de Johnny Hallyday a sacralisé cet évènement comme le souhaitait confusément notre inconscient collectif.


 La disparition d’une icône médiatique - symbole d’une époque bénie mais révolue, mais aussi symbole d’une époque où la voix de la France avait retrouvé son audience mondiale après le désastre de 1940 – sera certainement considérée par les historiens, dans le futur, comme la date charnière entre le 20ème et 21ème siècle.

 2017, par le décès de cette idole et par l’élection surprise d’Emmanuel Macron marque la fin d’une époque.


 L’élection présidentielle symbolise la disparition définitive des partis traditionnels qui ont tué la IVème République, le triomphe définitif d’un régime semi-présidentiel au détriment d’un simili régime parlementaire instauré depuis quelques années, et le retour sur la scène internationale de la France et de ses valeurs.

 Hélas, les luttes byzantines entre les héritiers du chanteur consacrent également la nécessité pour notre pays d’un véritable aggiornamento de notre système juridique et fiscal.

En lisant la presse, on découvre, sous le patronyme du chanteur, l’existence de sociétés en Suisse, Etats-Unis, aux Iles Vierges, qui pouvaient peut-être servir de paravent fiscal à l’idole. Cette situation juridique compliquée se double de l’interrogation sur le lieu réel de sa résidence.

Mettre fin à une fiscalité confiscatoire
 
 Tout cela a certainement pour origine d’abord et avant tout, le souhait de fuir une taxation fiscale qui dépasse pour certains artistes, écrivains, footballeurs, quelques professions libérales et chefs d’entreprises, les 60 % de leurs revenus. Il est temps, et cette disparition en est l’occasion, de mettre fin à cette situation fiscale confiscatoire.

Convergence fiscale européenne : un impératif
 
 En parallèle, il est impératif que l’Union Européenne comprenne qu’il est urgent d’avoir des taux d’imposition harmonisés et d’éviter une concurrence fiscale financièrement  préjudiciable aux citoyens et aux budgets des Etats.

Si l’Union Européenne réalisait son harmonisation fiscale, elle pourrait alors faire entendre sa voix à des pays comme les Etats-Unis (qui ont adopté récemment une grande réforme fiscale) tout en maintenant des zones qui sont de véritables paradis fiscaux.

 L’Union a bien accepté les contraintes américaines sur le blanchiment fiscal, pourquoi ne pourrait-elle pas imposer ses propres contraintes ?

 D’aucuns pourraient prétendre que le chanteur aurait peut-être décidé de régler sa succession aux Etats-Unis non pas pour des raisons fiscales mais juridiques. Il refusait peut-être essentiellement la notion de réserve héréditaire au profit de ses enfants.

Il n’est pas sûr que s’il n’y avait pas eu ces problèmes fiscaux, il aurait pris le risque de laisser ses descendants et son épouse s’affronter dans des querelles juridiques des deux côtés de l’Atlantique…
S’il n’y avait pas eu ces problèmes fiscaux, son notaire aurait pu lui expliquer qu’avec l’accord de ses enfants il avait le droit de réduire voire de supprimer cette réserve héréditaire et d’éviter ainsi tout procès catastrophique.

Un droit de la propriété intellectuelle inadapté

 Cette affaire illustre également l’inadaptation de notre droit de la propriété intellectuelle et artistique au monde moderne et surtout sa non reconnaissance par de nombreux pays, notamment les Etats-Unis, comme Maître Hoffmann, avocat spécialiste dans ce domaine le faisait remarquer dans une chronique publiée il y a quelques mois.

 La France, grâce à Beaumarchais, est à l’origine des droits d’auteur. Elle dispose pourtant en ce domaine d’une législation archaïque, dépassée et non compétitive.

Alors Monsieur Macron, pourquoi ne pas profiter de l’émoi suscité par cette querelle familiale pour réformer l’ensemble de ces dispositions ?

Espérons que ce message pourra être entendu.

Bernard MONASSIER
                                                                                       Président de BM FAMILY OFFICE
                                                                         Vice-Président du Cercle des Fiscalistes





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