« La crise sanitaire
va devenir une crise économique. Nous devons nous organiser afin que le pays
tienne, pour que les entreprises subsistent. Mais cela ne passera pas par une augmentation
des impôts ».
Ces propos d’Edouard
Philippe, Premier Ministre, ont été entendus par des millions de Français.
Sont-ils pour autant
rassurés sur une non-augmentation des impôts pour l’année à venir ? Rien
n’est moins sûr.
Un choc financier, économique et fiscal considérable
Le bon sens populaire s’attend
à un choc financier, économique, mais aussi fiscal, considérable.
Ils ne croient pas à une
solution miracle qui permette à l’Etat de faire face, sans dégâts collatéraux,
à un déficit que d’aucuns estiment à près de 12 % du PIB pour l’année 2020.
Consciemment – ou inconsciemment
– les Français ne croient pas que les recettes fiscales récurrentes pourront
faire face au remboursement ou même au paiement des intérêts d’une dette qui
aura explosée et cela parce que l’activité économique s’étant contractée, il
est évident que les recettes fiscales provenant tant des entreprises que des
contribuables personnes physiques, vont stagner voire diminuer.
Un risque d'inflation
La prise en charge de façon ponctuelle ou quasi-permanente d’une fraction de la dette de la France ainsi que des autres Etats de l’Union par la Banque Centrale Européenne apparaît d’évidence comme un palliatif : soit il faudra un jour rembourser, soit il faudra avoir recours à une création artificielle de monnaie.
Dans notre inconscient
collectif, à tort ou à raison, en souvenir de l’époque où le
« Franc » existait et où les gouvernements successifs faisaient
tourner « la planche à billets » avec des dévaluations successives,
on reste persuadé que cette dernière solution ne peut que déboucher sur une
inflation galopante.
Les premières victimes
seront les personnes à revenus fixes, c’est-à-dire les retraités mais aussi les
titulaires de contrats d’assurance vie en Euros dont la majorité des détenteurs
sont peut-être là encore des retraités : double peine donc pour cette
catégorie de Français.
Un tel scénario, qui se
traduirait par une diminution drastique du niveau de vie de nos compatriotes,
ne pourrait-il pas déboucher sur des mouvements violents de protestations,
voire des mouvements insurrectionnels ?
Le risque d'un vote populiste
En outre, il ne faut jamais oublier que la population française est vieillissante et que son poids électoral est important ce qui pourrait avoir pour conséquence un vote populiste lors d’élections nationales.
La solution à laquelle
tout le monde pense, sauf le Premier Ministre, serait de faire payer les riches
comme le préconisait Karl Marx au 19ème siècle.
Au-delà de la définition
de la notion de « riches » (est-on riche « au-delà de 4.000
€ mensuels de revenus » comme l’avait suggéré à une époque François
Hollande ?), il ne faut pas oublier qu’il ne faut pas trop taxer le
contribuable car « trop d'impôt tue l’impôt » et freine voire arrête la
machine économique.
Alors, dans ces
conditions, n’y-a-il aucune solution envisageable ?
Pour un emprunt citoyen
En 1958, la France paralysée politiquement par la Guerre d’Algérie, était dans une situation financière catastrophique.
Le Général de Gaulle,
revenu aux affaires, avec l’aide d'Antoine Pinay, Ministre des Finances, et de
l’économiste Jacques Rueff, a remis au goût du jour une technique ancestrale
utilisée à de nombreuses reprises dans notre Histoire, notamment en cas de
guerres : il s’agit de l’emprunt auprès des citoyens.
Cet emprunt, entré dans
l’Histoire sous le nom d'« emprunt Pinay » a été rendu attrayant par trois
mesures très simples :
- indexation sur l’or
- exonération d’impôt sur les
intérêts perçus
- absence totale de droits de succession sur le capital
souscrit
Le succès a été immédiat :
plus de 700.000 Français de toutes conditions y ont souscrit. Les épargnants ont
eu confiance en la stabilité de l’Etat, en sa parole, et par patriotisme – mais
peut-être également par intérêt fiscal – ont souscrit massivement dans les
perceptions, dans les banques mais aussi chez les notaires.
La souveraineté financière en jeu
Cette mesure populaire a permis à la France de retrouver très rapidement son indépendance financière vis-à-vis des prêteurs étrangers et du Fonds Monétaire International.
Dans le contexte actuel,
pourquoi ne pas recourir à une telle mesure ?
Pourquoi ne pas imaginer
que tout contribuable bénéficiant d’un certain niveau de revenus ne soit obligé de
souscrire à un emprunt similaire ?
Le bon sens populaire
pourrait certainement approuver une telle solution ou une telle mesure en se
souvenant qu’il ne faut jamais oublier que « ce sont dans les vieux pots
que l’on fait les meilleures confitures ».
Me Bernard MONASSIER
Notaire Honoraire
Vice-Président du Cercle des Fiscalistes