Faute d’harmonisation fiscale au plan mondial, citoyens et entreprises sont incités à faire des montages d’optimisation fiscale complexes et coûteux, analyse Maître Bernard Monassier. Les scandales fiscaux récents, Panama ou Paradise Papers, l’ont à nouveau montré. La succession de Johnny Hallyday devrait rouvrir le débat sur le niveau d’imposition en France.
Où était domicilié Johnny Hallyday ? Début
décembre, « l’idole des jeunes » a été élevée au rang de « héros national » par le Président
Macron lors d’un hommage populaire venu couronner une carrière exceptionnelle. Sa
succession soulève désormais des points juridiques et fiscaux complexes, sans
compter les droits d’auteur, et de composition, d’interprétation et d’édition
musicale.
La star du rock était,
paraît-il, domiciliée aux États-Unis. Je ne connais pas son dossier, ni ses éventuelles dispositions
testamentaires. Mais la première question qui se pose est de savoir quelle
fiscalité sera applicable à sa succession. Celle de l’État de Californie ou la
fiscalité française ? Le lieu de résidence habituel du défunt au moment de
son décès est, en effet, clé pour ses héritiers, à savoir son épouse et ses
quatre enfants. La domiciliation de Johnny Hallyday au moment de son décès déterminera
la législation applicable à sa succession.
L’hétérogénéité
fiscale pousse à l’exil
Johnny Hallyday avait eu l’intention de se domicilier en Belgique
ou en Suisse. Premier point, Johnny Hallyday n’aurait pas eu la tentation belge,
luxembourgeoise, suisse ou américaine s’il n’existait pas une telle disparité fiscale
entre les différents pays. Second point, les statistiques de l’exil fiscal
seraient moindres, en particulier pour les artistes et les sportifs de haut
niveau, si les taux n’étaient pas aussi élevés dans certains pays, France en
tête.
Les héritiers trouvent
anormal que l’État
hérite de 45 % d’un actif
Entre parents et enfants, les taux de succession atteignent
tout de suite 45 % en France. Quand les enfants héritent de 55 % du patrimoine
de leur parent, les gens ne jouent plus. Les contribuables estiment qu’il est
anormal que l’État
hérite de 45 % d’un actif.
Quand les droits de succession s’élevaient à 20 % entre
parents et enfants, avant 1981, les contribuables râlaient, parce qu’ils
n’aiment pas payer des impôts, mais ils jouaient le jeu. À
45 %, les gens jettent l’éponge et ils cherchent des solutions d’optimisation.
Il y a des États
qui se prêtent à ce jeu en instaurant des taux inférieurs et des régimes de
faveur au plan fiscal.
L’exception fiscale
des non-domiciliés sur le sol britannique
Nulle part on ne parle du régime des non-domiciliés en
Grande-Bretagne. Or ce régime insensé prévoit, lorsque vous êtes un résident
français non-domicilié fiscalement en Grande-Bretagne, mais vivant à Londres néanmoins,
aucun impôt à acquitter outre-Manche sur les revenus qui ne sont pas
britanniques. Mais vous ne payez aucun impôt non plus en France car vous n’êtes
pas non plus domicilié dans l’hexagone ! Est-ce normal ?
Le premier fautif en
matière d’exil et d’optimisation fiscale à outrance, ce sont les États qui ont des fiscalités trop
élevées. Pourquoi aussi peu de contribuables sont-ils poursuivis pour
fraude en Suisse : parce que les taux sont supportables. En matière
d’optimisation et de fraude fiscale, le mécréant et le responsable ne sont
peut-être pas celui que l’on croit.
Bernard
MONASSIER
Président
BM FAMILY OFFICE
Vice-Président
du Cercle des Fiscalistes
● Définition
L’optimisation c’est
l’utilisation de la loi fiscale la moins imposée, selon le Conseil d’État.
L’utilisation de la loi fiscale la moins imposée est légale et saine, toujours selon le Conseil d’État.
D’ailleurs, un chef d’entreprise qui ne l’utiliserait pas commettrait une faute
de gestion. Il doit gérer son entreprise au mieux, dans l’intérêt de ses
clients, de ses salariés, de ses fournisseurs, et de ses actionnaires.
Simplement, il ne
faut pas que l’optimisation repose sur une fiction, sur aucune réalité
physique. Exemple, je me domicilie fiscalement dans un pays à fiscalité
privilégiée parce que la fiscalité est plus faible mais en réalité je continue
à habiter en France : c’est une fraude. J’ai le droit d’utiliser cette
solution mais à condition d’être réellement domicilié.
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site du Cercle des
Fiscalistes